Trois questions à Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos, sur la candidature de François Bayrou. « La popularité ne fait pas le vote. »
Trois questions à Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos


Comment expliquez-vous les difficultés de François Bayrou à percer dans la campagne présidentielle ?

Brice Teinturier.
Les difficultés du candidat François Bayrou datent de plusieurs semaines. Bien sûr, il y a la bipolarisation du débat politique actuel qui focalise tout sur le duel Nicolas Sarkozy – François Hollande. Néanmoins, cela pourrait, en lassant les Français, jouer en sa faveur.
L’autre raison provient de ses propositions. Son « produire français » lui a été profitable, mais depuis, on ne trouve plus rien.
Il réitère ensuite le schéma de 2007, en refusant de se positionner clairement à gauche ou à droite, et s’isole. Il y a cinq ans, la faiblesse de Ségolène Royal lui avait été favorable mais, aujourd’hui, les candidats en face de lui sont davantage crédibles.
Enfin, pointe la question du vote utile, puisqu’aucune proposition saillante, originale ou attractive n’émerge et que son positionnement n’est pas clair. Un vote utile qui le dessert, alors que, dans le même temps, sa cote de popularité ou de sympathie est au plus haut. Preuve que la popularité ne fait pas le vote.
François Bayrou ne risque cependant pas de s’effondrer, même si il est peu probable qu’il atteigne 20 % à 25 % des suffrages. 10 % à 15 % des électeurs croit fermement en lui.


Est-ce la faute du candidat ou du parti ? En 1974, le centre avait remporté l’élection…

Brice Teinturier.
Valéry Giscard d'Estaing n’était pas du centre. Ou tout du moins pas du même centre. VGE était du centre droit. Alors, certes François Bayrou a été ministre d’un gouvernement de droite, mais il représente « le centre du centre ». Son positionnement n’est ni clair ni performant. Il est difficile de savoir où il se situe dans le clivage gauche – droite.


Décideurs. Son électorat est-il aussi peu clair que lui ?

Brice Teinturier.
50 % de l’électorat du Modem est sûr de son choix. 50 % avoue pouvoir changer d’avis. C’est mieux qu’auparavant et la chose n’est pas nouvelle. En 2007, alors qu’il obtenait 18,6 % des voix, on qualifiait déjà son électorat de flottant.
Il ne faut surtout pas y voir le signe d’une faiblesse. C’est davantage le fruit de son positionnement politique. 8 % à 10 % des Français sont d’authentiques centristes. Le reste est le fruit de mouvements issus d’autres partis. Lorsqu’il est passé de 7 % à 14 %, François Bayrou a récupéré des sympathisants de François Hollande. Puis, avec le manque de nouvelles propositions, les déçus se réorientent vers Nicolas Sarkozy ou François Hollande.

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