Le saviez-vous ? Pour protéger notre planète, il ne s'agit pas seulement de lutter contre les émissions de CO2. Une technique peu connue mais mise en place par l'UE doit être utilisée par les pouvoirs publics et les citoyens : la méthode PEF (Product Environnemental Footprint).

Notre époque fonctionne par obsessions. Parmi ces idées fixes : les émissions de CO2, que les immanquables fortes chaleurs de l’été vont remettre au cœur des débats. Dans les prochaines semaines, nous n’allons même parler que de cela. Pire, ces obsessions ont leurs gourous qui trustent les plateaux télés…

Cette obsession contemporaine de la sacro-sainte empreinte carbone est en effet réductrice, et donc dangereuse. Et la gestion de l’eau ? Et l’épuisement des ressources fossiles, minérales, et l’usage des terres agricoles ? Et la qualité de l’air ? Et la toxicité des produits pour nos organismes, les sols, l’air et les océans ? Et la biodiversité ? Quand on parle protection de notre environnement, tout doit être regardé simultanément, avec une même exigence, car tout est lié ! Au point que, parfois, en croyant bien faire, et en agissant sur l’un de ces enjeux, sans prendre les autres en compte, on provoque plus de mal que de bien.

La crise écologique est une question complexe car l’impact environnemental ne se limite pas aux seules émissions de CO2. Épuisement des ressources naturelles non renouvelables, eutrophisation marine, utilisation des terres, émissions de particules fines, écotoxicité…  On compte en réalité 16 catégories d’impact reliées aux 9 limites planétaires. C’est tout le sens de la méthode PEF (Product Environmental Footprint), une méthode de calcul de l’impact environnemental validée par la communauté scientifique européenne, après un travail de près de dix ans, et reconnue officiellement par l’Union européenne comme seule référence, notamment dans son futur règlement pour l’éco-conception (ESPR).

La méthode PEF est reconnue officiellement par l'Union européenne comme seule référence

Nous avons donc une méthode scientifique, rigoureuse et validée, alors pourquoi chercher ailleurs ? Pourquoi perdre un temps précieux que nous n’avons plus ? Pourquoi la parole des "obsédés du seul carbone" a-t-elle une si forte valeur dans l’espace médiatique, et ne laisse pas la place à une vision plus globale de ces enjeux ? Nous aurions tous à y gagner. Car sans cette vision globale et systémique, comment décider et financer ce qui est vraiment écologique, décider là où il est le plus utile d'agir et ce qui est le plus vertueux de consommer ?

Girardier

Sans la vision globale de l’empreinte environnementale que permet la méthode PEF, on ne saurait pas que le transport des vêtements importés de pays lointains représente en fait moins de 5% de l'impact environnemental d'un vêtement : ce sont les matières premières et les procédés de teinture, filature, tissage et tricotage pour produire un vêtement qui sont sa principale source d'impact. Sans cette vision systémique, on ne saurait pas que le lait d'amandes a, en fait, un impact deux fois supérieur au lait de vache, en raison notamment de la très forte consommation d'eau nécessaire à la culture des amandes.

Enfin, sans l’approche multi-impact du PEF, on ne saurait pas qu’en été à Madrid il vaut mieux acheter des tomates françaises qu’espagnoles, car contrairement aux idées reçues, la distance entre le lieu de production et le lieu de consommation compte beaucoup moins que les conditions de culture et de production pour les fruits et légumes : pour une tomate, il faut une grande quantité d’eau, entre 30 à 50 litres. Or, en été, l’Espagne en manque cruellement…

Dans un monde qui valorise la simplicité, il nous faut au contraire accepter la complexité de la transition écologique. Il est urgent que les Etats membres de l’UE, au premier rang desquels la France qui persiste dans ses atermoiements sur les conditions de l’affichage environnemental, imposent enfin à tous les acteurs cette boussole européenne et universelle qu’est le PEF.  Avec l’ESPR, que propose la Commission européenne, et qu’il est de la responsabilité du Conseil et du parlement Européen de voter au plus tôt, l’Europe en a le pouvoir. A défaut, nous nous décarbonerons peut-être, mais notre planète ne sera pas sauvée pour autant.

Christophe Girardier, PDG de Glimpact et expert des questions environnementales

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